L’essentiel d’abord
- En première intention : la TCC-i (thérapie cognitivo-comportementale de l’insomnie).
- Les médicaments s’envisagent en complément (quand la TCC-i est indisponible, insuffisante, ou en relais court).
- Le choix dépend du type d’insomnie (difficulté d’endormissement vs maintien du sommeil), de l’âge, des maladies associées et du risque lié aux médicaments
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Les grandes classes thérapeutiques
1) Benzodiazépines (BZD)
Ex. témazépam, loprazolam, estazolam…
Les plus: efficacité rapide sur la latence d’endormissement et le maintien.
Les moins: tolérance, dépendance, troubles cognitifs, chutes (personnes âgées), somnolence résiduelle.
Pour quel type de prescription : pour une courte durée (généralement de 2 à 4 semaines), attention chez les plus de 65 ans.
2) « Z-drugs » (apparentés BZD)
Ex. zolpidem, zopiclone.
Les plus: demi-vie souvent courte → peu ou pas d’effet dans la journée.
Les moins: dépendance, peut exceptionnellement déclencher des parasomnies de type comportements complexes, entrainer une amnésie, risque d’accidents. Ces effets secondaires surviennent surtout en début de traitement, ou si on se réveille après la prise de médicament (alarme par exemple), ou en cas de prise d’alcool associée.
Place : pour une courte durée (généralement de 2 à 4 semaines), mêmes précautions que BZD.
3) Antagonistes des récepteurs de l’orexine (DORA)
Ce sont de nouveaux produits disponibles
Mécanisme : bloquent les récepteurs à l’orexine OX1R/OX2R → diminuent l’éveil, facilitent l’endormissement et le maintien sans agir sur GABA qui est la cible de 2 classes précédentes.
Molécules : daridorexant (Europe/France : Quviviq), suvorexant, lemborexant (disponibilités variables selon pays).
Daridorexant – points clés
- Indication : insomnie chez l’adulte (difficultés d’endormissement et/ou de maintien).
- Profil : demi-vie plus courte que certains DORA → moins de somnolence résiduelle attendue le matin.
- Efficacité : améliore la latence d’endormissement, les éveils nocturnes, le temps total de sommeil et les mesures de fonctionnement diurne.
- Tolérance : somnolence, fatigue, céphalées possibles ; contre-indiqué dans la narcolepsie.
- Interactions : métabolisme CYP3A4 (prudence avec notamment avec clarithromycine, kétoconazole, antiviraux de type ritonavir, jus de pamplemousse, qui ralentissent le métabolisme du médicament), éviter alcool et autres dépresseurs du SNC.
Place des DORA : option de 1re ligne médicamenteuse quand un traitement médicamenteux est nécessaire, profil bénéfice/risque souvent plus favorable que BZD/Z-drugs (dépendance et troubles cognitifs moindres), tout en gardant une évaluation régulière.
4) Mélatonine
- Mélatonine LP : Elle est utile chez les plus de 55 ans (endormissement/qualité perçue) et certains profils pédiatriques (ex. troubles du spectre autistique, selon AMM).
5) Antidépresseurs sédatifs (hors AMM en monothérapie de l’insomnie)
Ex. doxépine faible dose, trazodone, mirtazapine.
Place : si comorbidité dépressive/anxieuse et besoin sédatif.
Les moins: prise de poids, hypotension, sédation diurne ; prudence chez personnes âgées.
6) Antihistaminiques sédatifs
Ex. doxylamine, hydroxyzine.
Les plus: accessibles.
Les moins: efficacité limitée, faut augmenter les doses pour garder un effet, effets anticholinergiques (confusion, rétention urinaire…).
Place : pas de recours chronique.
7) Antipsychotiques sédatifs (hors AMM)
Ex. quétiapine (faible dose).
Les moins : risque métabolique (poids, diabète, dyslipidémie).
Place : à éviter dans l’insomnie isolée.
Recommandations des sociétés savantes (synthèse)
- ESRS (Europe, 2023) & AASM (USA) :
- TCC-i = standard de 1re intention.
- Si médicament : utiliser la plus petite dose efficace, durée la plus courte compatible avec l’objectif, réévaluer régulièrement.
- DORA (dont daridorexant) : recommandés comme options de choix quand un traitement pharmacologique est indiqué (efficacité sur endormissement + maintien, profil de sécurité favorable vs BZD/Z-drugs).
- BZD/Z-drugs : possibles à court terme seulement, éviter le maintien prolongé sauf situation exceptionnelle
- Mélatonine : utiles chez sujets âgés , tolérance favorable.
- Antidépresseurs sédatifs : réserver aux comorbidités psychiatriques.
- Antipsychotiques : non recommandés pour l’insomnie primaire.
- Antihistaminiques : déconseillés en chronique.
Comment positionner le traitement ?
- Si endormissement prédominant : DORA, ramelteon (selon pays), mélatonine LP (> 55 ans).
- Si maintien/réveils nocturnes : DORA (daridorexant), éventuellement Z-drug courte durée.
- Sujet âgé : privilégier médicaments à faible risque cognitif/chute (DORA, mélatonine LP), éviter BZD/Z-drugs.
- Comorbidités (dépression/anxiété, douleur, apnées) : traiter d’abord la comorbidité ; adapter le choix (éviter dépresseurs respiratoires en SAHOS non traité).
- Conduite/activités à risque : alerter sur la somnolence résiduelle possible (quelle que soit la classe) et tester la tolérance individuelle.