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Insomnie et microbiote, une piste à creuser ?

A 15 jours de la rentrée vous allez peut-être avoir vos enfants qui vont commencer à avoir mal au ventre ! Et oui notre ventre est connecté à notre cerveau et à nos émotions. Tout le système digestif est formidablement riche en terminaisons nerveuses. Depuis ces dernières années ces liens étroits entre notre cerveau et notre intestin sont étudiés au point qu’on commence à comprendre certaines maladies psychiatriques en étudiant notre microbiote, c’est-à-dire toutes les colonies de bactéries qui habitent dans notre intestin. Notre humeur est ainsi très dépendante de l’équilibre de ces différentes colonies.

Un pas vient d’être franchi avec une jolie étude sur l’insomnie et le microbiote  intestinal montrant que certaines colonies bactériennes sont plus fréquentes dans l’insomnie alors que d’autres sont plutôt protectrices de l’insomnie.

Investigating bidirectional causal relationships between gut microbiota and insomnia (Shi et al., General Psychiatry, 2025)

Un petit résumé de l’article pour vous permettre de mieux comprendre

Objectif

L’étude visait à explorer les relations causales bidirectionnelles entre le microbiote intestinal et l’insomnie, au-delà des simples corrélations déjà décrites dans la littérature.

Méthodes

  • Approche : analyse de randomisation mendélienne (MR) à deux échantillons.
  • Données utilisées :
    • GWAS sur l’insomnie (N = 386 533, UK Biobank).
    • Deux grandes bases sur le microbiote intestinal :
      • MiBioGen (N = 18 340)
      • Dutch Microbiome Project (N = 8208).
  • Analyses : méthodes IVW (Inverse Variance Weighted), MR-Egger, MR-PRESSO, tests de sensibilité (leave-one-out, Steiger).

Résultats

  • Effet du microbiote sur l’insomnie :
    • 14 groupes de bactéries (taxons) sont associés à une augmentation du risque d’insomnie (ex. Clostridium innocuum groupPrevotella 7Lachnoclostridium).
    • 8 taxons ont un effet protecteur (ex. Coprococcus 1Lactococcus).
  • Effet inverse (insomnie → microbiote) :
    • Insomnie est associée à une diminution de l’abondance de 7 taxons et une augmentation de 12 autres.
  • Lien robuste : le genre Odoribacter est ressorti comme un marqueur clé avec un effet bidirectionnel significatif.
  • Robustesse : absence de pléiotropie significative, résultats confirmés par plusieurstests de sensibilité (la pléiotropie désigne le fait qu’un seul gène (ou variant génétique) influence plusieurs traits ou phénotypes différents).

Conclusion

L’étude apporte des preuves génétiques préliminaires d’une relation causale bidirectionnelle entre certains taxons du microbiote intestinal et l’insomnie, suggérant des pistes thérapeutiques innovantes centrées sur le microbiote.

Discussion critique

C’est une avancée indéniable

  1. Avancée méthodologique :
    L’utilisation de la randomisation mendélienne limite les biais des études observationnelles (confusion, causalité inverse).
  2. Approche bidirectionnelle :
    L’étude démontre non seulement l’influence du microbiote sur l’insomnie mais aussi l’impact de l’insomnie sur le microbiote, renforçant l’idée d’un véritable dialogue via l’axe intestin–cerveau.
  3. Identification de taxons cibles :
    Certains genres bactériens (ex. Clostridium innocuum groupCoprococcus 1Odoribacter) émergent comme candidats pour de futures interventions (probiotiques, prébiotiques, transplantation fécale).
  4. Perspectives thérapeutiques :
    L’étude ouvre la voie à des stratégies personnalisées de modulation du microbiote pour prévenir ou traiter l’insomnie.

Mais il y a des limites à cette étude

  1. Population homogène :
    Les données proviennent uniquement de participants d’ascendance européenne, limitant la généralisation à d’autres ethnies et environnements où le microbiote diffère.
  2. Facteurs non pris en compte :
    Les analyses génétiques ne capturent pas toute l’influence des facteurs environnementaux (alimentation, mode de vie, stress), pourtant cruciaux dans la composition du microbiote.
  3. Hypothèses fortes de la technique MR :
    • Absence supposée d’interactions gène–environnement.
    • Validité des variants génétiques comme instruments.
      Toute violation affaiblirait les inférences causales.
  4. Résultats surtout prédictifs :
    L’étude met en évidence des associations causales potentielles, mais ne décrit pas les mécanismes précis (rôle des métabolites microbiens comme SCFAs, tryptophane, sérotonine, etc.).
  5. Besoin de validation clinique :
    Seuls des essais randomisés contrôlés avec interventions microbiote-ciblées permettront de confirmer la pertinence thérapeutique.

👉 En résumé, cet article constitue une étape importante vers la compréhension des relations entre microbiote et insomnie. Il propose des pistes prometteuses pour des approches thérapeutiques innovantes, tout en rappelant que les résultats restent préliminaires et nécessitent validation clinique et élargissement à d’autres populations.

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