L’apnée du sommeil touche des millions de personnes en France. Elle se traduit par des pauses respiratoires répétées pendant la nuit, responsables de ronflements, de micro-réveils, de fatigue diurne et, à long terme, de risques cardiovasculaires accrus.
Le traitement de référence est la pression positive continue (PPC), une machine qui envoie de l’air sous pression via un masque, empêchant l’obstruction des voies respiratoires. Ce dispositif améliore la vigilance, le sommeil et protège le cœur. Mais tout le monde n’arrive pas à l’utiliser sur le long terme.
Une équipe du CHU de Grenoble a suivi plus de 600 patients pendant 5 ans afin de comprendre pourquoi certains gardent leur PPC… et pourquoi d’autres la rangent au placard.
Une bonne nouvelle : la majorité continue
Au bout de 5 ans, 7 patients sur 10 utilisaient encore leur machine. C’est encourageant, surtout quand on sait que, dans la “vraie vie”, beaucoup de patients arrêtent plus tôt. Les spécialistes insistent : plus on garde la PPC, plus les bénéfices se font sentir sur la qualité de vie et la santé cardiovasculaire.
Qui garde sa PPC?
Plusieurs facteurs étaient associés à la poursuite du traitement :
- Les hommes : ils étaient plus nombreux que les femmes à continuer.
- Les cas sévères : plus l’apnée du sommeil est grave (nombre élevé de pauses respiratoires, oxygène qui chute fortement la nuit), plus les bénéfices sont visibles… et plus la motivation reste élevée.
- Les patients très fatigués au départ : ceux qui souffraient de somnolence importante retrouvent vite de l’énergie et voient l’intérêt du traitement.
- Un sommeil plus long et plus stable avant traitement : les “bons dormeurs” tolèrent mieux la PPC.
En clair, quand la maladie est sévère et gênante, la PPC change la vie. Le masque devient alors un allié incontournable.
Qui arrête sa PPC ?
À l’inverse, certains profils sont plus à risque d’abandon :
- Les femmes : l’apnée du sommeil se manifeste différemment chez elles, souvent avec de l’insomnie ou de la fatigue diffuse, ce qui rend les bénéfices de la PPC moins évidents.
- Les formes légères ou modérées : quand les symptômes sont moins marqués, les contraintes du masque prennent le dessus.
- Les patients peu somnolents : ceux qui ne se sentaient pas vraiment gênés au départ ont plus de mal à s’accrocher.
- Ceux qui souffrent d’autres troubles du sommeil (insomnie, réveils fréquents, syndrome des jambes sans repos) : la PPC ne résout pas ces problèmes, et la machine peut même paraître pesante.
- Les dormeurs courts et fragmentés : un temps de sommeil réduit dès le départ est associé à un risque accru d’arrêt.
- Un taux d’oxygène nocturne “correct” : paradoxalement, ceux dont la saturation sanguine restait globalement bonne se sentaient moins “malades” et abandonnaient plus volontiers.
Ce que ça change pour les patients
Le message clé de cette étude est simple : l’adhésion à la PPC dépend autant de la gravité de l’apnée que de la qualité du sommeil de départ et du ressenti du patient.
Cela signifie que deux personnes avec le même diagnostic peuvent avoir une expérience très différente :
- L’une, épuisée par des nuits catastrophiques, retrouve enfin un sommeil réparateur et ne lâchera pas sa machine.
- L’autre, peu gênée au quotidien, jugera vite le masque trop contraignant et l’abandonnera.
Vers un suivi plus personnalisé
Pour les chercheurs, ces résultats doivent aider à adapter l’accompagnement :
- mieux dépister l’insomnie ou le syndrome des jambes sans repos,
- ajuster les objectifs pour les “petits dormeurs”,
- tenir compte des différences entre hommes et femmes,
- renforcer l’éducation thérapeutique et le suivi rapproché dans les premiers mois.
En d’autres termes, la PPC n’est pas un traitement “copié-collé” pour tout le monde. C’est un outil puissant, mais qui doit être intégré dans une prise en charge personnalisée et adapté.
Conclusion
La PPC reste la pierre angulaire du traitement de l’apnée du sommeil. Cette étude rappelle que la réussite ne repose pas seulement sur la technique, mais aussi sur l’adaptation au profil de chaque patient.
La majorité continue à long terme, surtout quand les bénéfices sont nets. Mais pour les patients moins symptomatiques ou déjà fragiles sur le plan du sommeil, un accompagnement spécifique est indispensable pour éviter l’abandon.
👉 En résumé : la PPC marche quand on la garde, mais pour la garder, il faut qu’elle marche — autrement dit, que le patient ressente rapidement une amélioration.
L’article : https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1389945725003958